Le laid

Je découvre cet après-midi Ursina Gysi (lire interview en anglais) sur le blog du Sartorialist et je décide justement de partager la photo de Scott Schuman sur twitter (vous pouvez me suivre ici : @charleddy)


La réaction ne se fait pas attendre : 



Et ces réactions là m'ont donné envie d'écrire sur quelque chose dont on ne parle pas beaucoup, ou du moins que moi je ne vois pas beaucoup sur internet : le rapport des gens à la mode. Je mets ce mot en italique parce que je l'utilise volontairement de manière galvaudée pour me référer à l'habillement, aux vêtement, à la tenue. 

Avant d'aller plus loin, je tiens à préciser que les réactions ci-dessus ne sont pas des réactions idiotes ou bien stupides. Simplement, je trouve qu'elles sont révélatrices d'un certain mouvement qui voudrait que la mode, l'habillement, soit "beau", obéisse à des règles fixes, précises et claires. Or s'il est un art qui est complètement ignoré et moqué, c'est bien celui de l'habillement. 

Pour beaucoup de gens, la mode, c'est avant tout un un moyen de se couvrir. Et quand je dis couvrir, je ne parle pas de mauvais temps, je veux littéralement dire "se couvrir pour ne pas sortir nu parce que cela n'est pas accepté par la société". Pourtant il n'y a pas si longtemps, l'habillement définissait clairement qui l'on était et la place que l'on occupait dans la société. L'évolution de la société et la démocratisation de l'accès à la mode - j'utilise cette fois-ci le mot pour ce qu'il est : une tendance - nous a fait oublier que l'habillement reste une déclaration de principes. Ne parle-t-on pas de tenue ? Le même mot que l'on utilise pour parler de comportement...  Au fil du temps, il semblerait que l'on ait oublié que les vêtements sont avant tout un moyen d'expression. Que portes-tu ? Qui es-tu ? Que veux-tu me dire ? Si les vêtements n'étaient pas un moyen d'expression, alors pourquoi devrait-on s'habiller différemment pour un mariage ? Pour un entretien ? Pour aller au travail ou travailler au jardin ? 

Partant de cette constatation, je pense qu'il faut réapprendre à considérer l'aspect non-pratique de l'habillement. S'habiller, ce n'est pas seulement se couvrir, c'est communiquer. Est-ce qu'on doit pour autant en faire une prise de tête tous les matins à l'heure de se vêtir ? Certainement pas. À moins bien sûr que notre profession soit liée de prêt ou de loin à la mode, aux passerelles, aux designers... Et justement c'est le cas de Ursina ! 

Alors pourquoi Ursina s'habille-t-elle de la sorte ? Que nous dit sa tenue ? 
Évidemment au premier abord, ce n'est pas vraiment réjouissant : un short de basket type baggie, un vieux pull que ma grand-mère qualifierait de "gueye" et des chaussures à semelles compensée apparentées bois... On ne peut pas dire que ce soit du plus bel effet. Mais... Et si Ursina voulait justement s'enlaidir, faire une déclaration de principe qui nous dirait "J'emmerde votre establishment" ? Et si elle aimait cette association de couleurs ou alors qu'elle avait simplement tenté de les combiner, pour voir ? 

N'oublions pas le contexte : Ursina vit à Paris, ville qui a tué sa mode depuis bien bien longtemps et qui fait pâle figure à côté de villes comme Milan ou New York sur la scène internationale (et je ne parle même pas de Londres). Une ville dont la créativité est à la ramasse, en tous cas sur les passerelles, et qui peine à faire entendre à sa population que non, on n'est pas obligé de porter la même robe, les mêmes chaussures, les même pantalons, les mêmes vestes que tout le monde et que oui, il y a une vie après le noir, le gris ou le bleu marine. 

Je ne peux pas dire que j'aime l'accoutrement d'Ursina, parce que ce serait mentir. Je suis même en mesure de le trouver laid, comme @nekkoto me le fait remarquer. Mais c'est peut-être justement ce que j'aime. 

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