L'humour

Si je devais faire un top 5 des choses les plus difficilement exportables, l'humour serait sans aucun doute en première place.

L'autre jour, alors que j'en étais à ma 15ième blague loupée du déjeuner, un constat s'est imposé : l'humour est avant tout une affaire de timing. Vous avez certainement déjà vécu cette scène : quelqu'un dit quelque chose et par un système absolument merveilleux, cela vous inspire une situation cocasse ou pour le moins comique. Vous pensez donc à cette chose et vous la visionnez, elle vous fait sourire, vous la formulez et vous l'exprimez. Il s'est passé 1 seconde environ. Les merveilles du cerveau humain. Ça c'est ce qu'il se passe quand vous êtes avec des potes et que vous avez une répartie plus développée que celle d'une moule.

Quand vous êtes à l'étranger, un autre système vient se greffer sur le premier. C'est celui qui vous permet de vivre à l'étranger d'y travailler. Un système qui fonctionne environ 24/24h : la compréhension. C'est ce système qui vous permet de saisir ce que vous disent les gens. Dans une discussion "normale", entre français, ce système est invisible son fonctionnement est des plus discret et je suis sûr que peu d'entre vous se rendent compte même de son existence. Si c'était une voiture, elle aurait la taille d'une smart, roulerait à 180 km/h, serait complètement silencieuse et fonctionnerait à l'énergie solaire. À l'étranger, ce système se met en marche dès que quelqu'un vous adresse la parole, il requiert toute votre concentration et est en plus est assez défectueux. Pour poursuivre la métaphore, c'est une grosse Volvo avec 500.000 km au compteur et qui roule au Gasoil quand elle veut bien démarrer et est super bruyante - en plus d'être lente. Pour la faire courte : à l'étranger, on n'a pas le luxe d'entendre. On doit écouter. Tout le temps.

En français, quand je suis sur l'autoroute de l'humour avec ma Smart à l'énergie solaire, je double à tout va, me faufilant de gauche à droite et de droite à gauche, faisant des appels de phares au connard devant moi qui veut pas me laisser passer et en plus il a laissé son cligno enclenché sur la droite mais il se rabat pas. Oh je sais bien que ma conduite ne plaît pas à tous mais bon, je vais vite. En espagnol, force m'est de constater que ma Volvo est plus toute jeune et quand je suis en côte ascendante - ce qui me semble être tout le temps - je suis du genre à me mettre sur la file tout à droite, celle qui dit "VÉHICULE TRÈS LENT". Si je peux, je préfère toujours prendre une nationale, parce que sur l'autoroute y'a des têtes brûlées qui filent beaucoup trop vite à mon goût. En un mot comme en cent j'en chie grave et y'a un connard derrière moi qui me fait des appels de phares, pourtant j'ai mis mon cligno à droite ça va je vais me rabattre et si t'es pas content ben T'AS QU'À PASSER PAR-DESSUS TIENS CONNARD !

L'impuissance que l'on ressent au moment de faire une blague à l'étranger est comparable à celle du jeune conducteur qui voit s'éloigner la sortie qu'il aurait dû prendre. On sait que c'était cette sortie, qu'on serait arrivé à l'heure en la prenant, mais c'est trop tard elle est passé et il n'y a rien qu'on puisse faire à part guetter la suivante en espérant que le trajet se rallonge pas trop.

Une autre fois je vous raconterai "Le sens de l'humour". Ce moment magnifique ou on réussit à faire une blague qui serait très drôle en français sauf que ça ne prend pas du tout. Là c'est carrément la panne sur l'autoroute de l'humour et y'a un mec qui s'arrête pour savoir si vous avez besoin d'aide.

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