Le papier

Dans le film Le Nouveau Protocole, Clovis Cornillac joue Raoul Kraft. Raoul mène une vie paisible jusqu'à ce que son fils Franck meure d'un accident de la route. Il découvre que son fils jouait le cobaye pour un laboratoire pharmaceutique et que sa mort pourrait être due, en partie, aux médicaments qu'il testait au moment de l'accident. Raoul va alors combattre le lobby pharmaceutique pour apprendre la vérité sur la mort de son fils et découvrir l'horrible industrie des médicaments. Si vous n'avez pas vu le film et que vous souhaitez le découvrir, arrêtez votre lecture ici. À la fin du film, Clovis Cornillac est désemparé et choisit de tenter d'assassiner l'une des personnes les plus influentes du lobby pharmaceutique. À l'heure d'expliquer son geste, il indique qu'il a choisi la seule solution pour que le public s'intéresse enfin aux monstruosités auxquelles l'industrie pharmaceutique se livre. La tentative d'assassinat spectaculaire et le procès qui s'en suivent sont en réalité des excuses pour que l'industrie pharmaceutique se retrouve exactement où elle ne veut pas : sur le devant de la scène.


Dimanche soir dernier, les premiers commentaires sur les Panama Papers étaient publiés sur Twitter (notamment) : "Ça ne servira à rien", "Vivement qu'on continue de s'en moquer", "Très choqué d'apprendre que des gens ne paient pas leurs impôts".

Hier soir, le Zapping - ultime bastion d'une chaîne télévisée qui est en train de mourir ? - a fait un numéro presque spécial tant celui-ci est à charge contre son nouveau président : Vincent Bolloré. Là encore, des voix s'élèvent nous indiquant que Vincent Bolloré ne serait pas l'unique représentant d'un système pourri jusqu'à la moelle. On nous explique que Bolloré n'est qu'un actionnaire dans la plupart des cas, notamment en Afrique où il fait d'innombrables investissements. On nous rabâche que taper sur Bolloré ne servirait pas à grand chose.


Mais alors, pourquoi le fait-on ? Eh bien à mon sens, justement parce que c'est utile et nécessaire. Pour plusieurs raisons :
- en premier lieu parce que si on ne publie rien sur la fraude fiscale ou sur les méthodes de Bolloré, ce sont toujours les mêmes qui gagnent ;
- ensuite parce que ces publications parviennent à faire ce que ces acteurs redoutent : les mettre sur le devant de la scène ; et c'est important qu'ils y soient au moins un peu, dans un monde où nous fonctionnons par pique d'intérêt, en sautant d'un sujet chaud à un autre ;
- puis parce que cette lumière crue qui est faite sur ces pratiques permettent de débattre, d'en parler et de discuter des méfaits de celles-ci sur les structures et les individus ;
- enfin parce que ça nous permet de voir comment nous nous positionnons en tant qu'État, de voir la santé de notre démocratie ; et force est de constater qu'elle va moins bien que la démocratie Islandaise qui 

Dans le cas de Vincent Bolloré, je ne pense pas que celui-ci soit responsable du traitement des employés au Cameroun. Mais enfin on peut s'interroger de savoir pourquoi il ne s'y intéresse pas plus. Après tout, si vous vous mettez à sa place quelques secondes, n'envisageriez-vous pas de savoir comment les gens qui forment les structures dans lesquels vous investissez sont traités ?

Et dans le cas des Panama Papers, la fraude fiscale n'a en effet rien de nouveau. Mais n'est-il pas important de faire toute la lumière possible sur l'ombre confortable dans laquelle se trouvent les fraudeurs ? Cela fait très longtemps que cela arrive, et personne ne fait rien. Le mérite des Papers, c'est justement d'avoir montré du doigt publiquement à quel point le système est gangréné, pour que l'on ne puisse pas dire "je ne savais pas". Je vous laisse avec - selon les propres mots d'Edward Snowden - le moment exact où le premier ministre islandais réalise que des journalistes ont découvert son secret.

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